J’aurais jamais dû le quitter des yeux


Lundi 5 janvier 2015  Le Mans (places Jacobins-Jet d’eau)

Ce lundi matin, alors que ceux qui reprennent le travail (s’ils en ont un !) et s’échangent les meilleurs vœux, de lointains grondements se font entendre. Pas les Vingt-quatre heures moto, nous sommes un lundi ! Des tondeuses ? Pas trop la saison ! Non ! des tronçonneuses… J-C est passé à l’acte [1]. La menace qui pesait sur le magnifique « arbre aux quarante écus » est advenue ! Le magnifique ginkgo biloba est là, débité, un  nouveau gisant, au pied de la cathédrale. Pour nous, cette espèce porte aussi un message symbolique.

ginkgo biloba de la cathédrale droits instagram

Photo : Instagram

Le texte qui suit, en grisé et en italique, est la reprise du commentaire d’un membre de SDN 72 glissé à la suite de l’article de Yves Ollivier sur son blog (vendredi 23 janvier), concernant cette affaire, c’est là : .

Le ginkgo biloba passe pour être l’arbre le plus vieux du monde. Six d’entre eux ont survécu à la bombe atomique d’Hiroshima. Au Japon, il est un symbole de longévité, de vie, de renouveau et… porteur d’espoir !

Le maire du Mans, Jean-Claude Boulard, s’était abstenu — à raison — de faire sonner le tocsin le 3 août 2014 pour la commémoration du centenaire de la mobilisation de la guerre 14-18 préférant, nous a-t-il dit, célébrer l’armistice. J’ignore s’il a l’intention de commémorer le triste soixante-dixième anniversaire d’Hiroshima et Nagasaki les 6 et 9 août 2015, en tout cas, ce ne sera pas au pied de ce magnifique et très symbolique ginkgo biloba qu’il pourra le faire.

De nombreuses villes (6 000 dans plus de 150 pays), comme Saintes [2], sont adhérentes de l’association « Maires pour la Paix », présidée par le maire d’Hiroshima. Notre ville gagnerait à les rejoindre et à célébrer l’événement en replantant un tel arbre. Il va de soi qu’une telle décision devrait être prise après un débat municipal, associatif et citoyen. Qu’en pense notre sénateur-maire Jean-Claude Boulard ?

Par le passé, la ville du Mans a déjà choisi d’honorer des personnes remarquables, l’anti-ségrégationniste non-violent Martin Luther King, le scientifique naturaliste Théodore Monod (c’est là : ), etc. Outre son magistère, on ne peut taire les multiples engagements de ce dernier pour la cause animale, les sans-logis, son antimilitarisme, sa lutte antinucléaire et les deux croisées. Avec Solange Fernex, il avait créé la Maison de vigilance à Taverny, en 1984 (à cette époque, centre de commandement des forces nucléaires françaises). Il manifestait et jeûnait du 6 au 9 août (commémoration d’Hiroshima et Nagasaki) depuis cette date jusqu’à l’année d’avant sa mort, en 2000. En attachant son patronyme à un parc public aménagé sur le site d’une ancienne caserne, la municipalité a d’abord consacré un grand scientifique, mais aussi ses combats.

Au PS aussi, il y a de plus en plus de voix pour se désolidariser de l’arme atomique (P. Quilès, M. Rocard et d’autres) [3]. C’est aussi ce choix qui a légitimé l’industrie nucléaire civile dont on voit aujourd’hui la vulnérabilité avec l’introduction sur des sites nucléaires de militants sans intentions malveillantes (stégophiles de Greenpeace), mais aussi le survol par des drones de nombreuses centrales nucléaires ainsi que la base de sous-marins nucléaires de l’Ile-Longue. Il est maintenant flagrant que, outre le coût, l’arme atomique nous expose davantage qu’elle ne nous protège.

« Tout est pardonné » Monsieur le Maire ! Mais d’ici le soixante-dixième anniversaire d’Hiroshima et Nagasaki, deux ginkgos bilobas, baptisés à ces noms, sont à replanter et à commémorer [4].


[1] C’est une image. Jean-Claude Boulard (sénateur et maire du Mans) s’est habilement et à plusieurs reprises défaussé sur une expertise de l’architecte des Bâtiments de France, Nicolas Gautier, qui préconisait cet abattage pour protéger un mur de la cathédrale et permettre des fouilles archéologiques et retrouver des vestiges du jubé du cardinal de Luxembourg. 

[2] Cette ville adhère également à « Abolition 2000 », le réseau mondial d’ONG et de municipalités visant à libérer la planète du danger nucléaire.

[3] Arrêter la bombe, de P. Quilès, J.-M. Collin et B. Norlain (éd Cherche-Midi, 2013). Le blog de Quilès, c’est là :. Consulter aussi cette contribution au congrès du PS à Toulouse (26, 27 et 28 octobre 2012), c’est là : .

[4] Depuis le vendredi 30 janvier, le maire s’est engagé à replanter un ginkgo biloba à la place du hêtre pourpre qui n’a pas survécu à sa transplantation (20 000 € !) du tunnel à la nouvelle place des Jacobins. Au Mans, les arbres ont aussi leur comité de soutien. Le soutien au ginkgo biloba avait réuni 8 000 signatures et même suscité deux rassemblements. Le premier, le 21 décembre 2014, le second le 5 janvier 2015. C’est à découvrir sur le site de la PEM, Patrimoine environnemental menacé, c’est là : .


Crédit photo : Photo non aurorisée (pour l’instant) repiquée à Instagram.
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