Je suis Charlie !


 Mercredi 7 janvier 2015, à 11 h 30 — Partout

Pain-crayons-JL B (Charlie) « Un seul être vous manque et tout est dépeuplé » (1). Et là, ils sont six, douze, dix-sept… fauchés par des barbares fanatisés, pour l’exercice de leur art, de leur impertinence, de leur fonction, de leur incroyance, de leur foi. Tous Charlie ! Oui ! Nonobstant, qui aime bien châtie bien !

La bande de joyeux drilles n’avait pas que les surperstitions religieuses et obscurantistes (TOUTES) dans leur ligne de mire. Ils étaient aussi des apostats du mythe nucléaire.

couv-nucleaire Charlie H sapéEt cette cause leur doit bon nombre de chromos, et des meilleurs ! En août 2012, l’équipe avait commis un hors série — malheureusement toujours d’actualité — sur le sujet : L’escroquerie nucléaire, 70 ans de rayonnement atomique de la France, titre qui en dit déjà long sur la charge antinucléaire à venir, un soixante-quatre pages (en A3 plié en 21 x 29,7, prix public : 6 € + port) argumenté par Fabrice Nicolino (2), grièvement blessé à la jambe lors du « bal tragique » ou massacre du 7 janvier. Il est encore temps de vous procurer ce Charlie Hebdo-là, il n’a pas pris une ride. C’est le meilleur gage de notre soutien à cette fabuleuse équipe qui avait aussi enfanté La gueule ouverte, journal écologique de la veine de Charlie Hebdo du début des années soixante-dix, qu’on aimait malicieusement réclamer à notre buraliste (à la direction : Isabelle Monin-Cabu, après la mort du génial Pierre Fournier, en 1973).

Des-tignous-caleaux-charlie-hPourtant, j’étais devenu un « infidèle ». Oui, nous avons eu notre « quant-à-nous » sur la deuxième période de Charlie Hebdo car des personnes comme Oncle Bernard (Bernard Maris) et Philippe Val (ce dernier a viré Siné comme un malpropre, faisant perdre plusieurs milliers de lecteurs et amenant l’hebdomadaire près de la faillite), étaient rangés à l’Europe et à l’économie libérale, certes moralisée. Par l’entregent « carlita-sarkoziste », Jean-Luc Hees a été nommé à la direction de Radio France et Philippe Val à celle de France Inter, censeurs de Stéphane Guillon et de Didier Porte, précenseurs de l’émission Là-bas si j’y suis, et pas que… 

charlie-cabu-centraleOui, nous avons marché, et c’est notre deuxième réserve. Il y en aurait bien d’autres. Marché en mémoire des massacrés qui disaient tout haut ce qu’on pense tout bas. Qui le disaient pour ici mais aussi pour là-bas ! Pour tous ceux qui sont muselés, baillonnés, embastillés, torturés, exécutés… on arrête là l’horreur. Et certains de ces museleurs, baillonneurs, embastilleurs seraient venus « marcher » pour Charlie à Paris ? Ceux-là n’entendent de marcher que marché financier, marché des Rafale, marché des centrales, marché des armes de répression. Oui ! nous avons marché, mais pas dans vos combines !

Ce site part et parle de notre sphère, la Sarthe, voire le Maine, et de militants et d’événements antinucléaires qui ont peu ou prou à voir avec ce territoire. Là, pas grand-chose à se mettre sous la dent. Certes, Cabu avait ses habitudes dans le département, ces dix dernières années (il rejoignait sa compagne à Nogent-le-Bernard pour y passer le week-end). À l’occasion, il ne dédaignait pas dégainer ses feutres sur les terres de La Ferté. James Tanneau (librairie La Taupe, puis Plurielle) et le comité d’entreprise des MMA l’avaient reçu, début 1986 (cf. photo ci-contre),cabu-james-hubert lors d’un débat avec Jean-Yves Potel, un des collaborateurs de l’Etat de la France au palais des congrès et une séance de dédicaces de son nouvel album d’alors : Bien dégagé sur les oreilles (La Découverte). Grand amateur de jazz, d’Armstrong à Miles Davis, il n’arpentait pas les allées de l’Europa Jazz Festival du Mans mais Armand Meignan l’avait côtoyé à Nice, Antibes ou Chateauvallon. Surtout, certains d’entre-nous l’avions croisé, ici ou là, toujours sur des théâtres de lutte, comme celle contre le camp militaire de Fontevraud en 1975 (perdue, à l’inverse du Larzac, à la même époque). Wolinski avait aussi personnalisé une des voitures de l’écurie Porsche de l’édition 1998 des Vingt-quatre heures du Mans. Tignous, lui, s’en moquait (des Vingt-quatre heures) — côté dopage, dans Le sport dans le sang (éd. Emma Floré). La librairie Doucet l’avait invité au Salon du livre dans les années 2000. Corinne Rey (rescapée), dite Coco dans Charlie, dess-coco-touch-pas-couleétait passée au troisième Festival de caricatures et de dessins de presse de Teloché. Marie-Danielle Hercent-Letessier, présidente et organisatrice, ambitionnait d’ailleurs d’accueillir ou Cabu, Wolinski, Tignous, Charb, l’une de ces quatre pointures, pour l’édition 2015 ou la suivante, qui aura lieu à Mulsanne cette fois ! Espérons une surprise pour la prochaine édition dédiée à « L’hymne à l’humour ».

Passées les grandes et multiples mobilisations, hommages et minute de silence autour du 11 janvier, la réflexion avec les médias (télés, radios, journaux), journalistes et dessinateurs de presse, s’est prolongée dans les lycées (ex. : Racan et Maréchal-Leclerc à Château-du-Loir) vendredi 23, au cinéma les Récollets dans cette même ville, le jeudi 29, avec la projection de Je suis traits libres (organisé par la municipalité et Ciné-Off) ; au cinéma Pathé, au Mans ; avec le Club de la presse du Maine, le jeudi 5 février, aux Quinconces, etc. Les rencontres Femmes d’histoire ont invité aussi la cartooniste tunisienne Nadia Khiari et son chat, Willis From Tunis, le samedi 7 févier, avec une exposition de vingt-cinq de ses meilleurs dessins au PCC.

Et si, passés la compassion et l’émotion, la conscience de la vulnérabilité de nos équipements de production énergétique centralisés,  à hauts risques, mettant en circulation de très dangereux déchets — nommons-les « CENTRALES NUCLÉAIRES » ! — venait à tous, politiques, citoyens ?

Bien sûr, si vous en savez plus sur la bande de Charlie Hebdo et la Sarthe, nous sommes preneurs.


(1) Alphonse de Lamartine.

(2) Fabrice Nicolino est l’auteur de Bidoche, l’industrie de la viande menace le monde et de Qui a tué l’écologie ? (chez : LLL Les liens qui libèrent). Son blog est là : .


Crédits illustration : SDN 72 (J-L B), dessins et dessinateurs de Charlie-Hebdo. Photo : collection James Tanneau.