Les 100 ans de l’Arac


Samedi 11 novembre 2017 – Allonnes

Le 11 novembre 2017, l’Association républicaine des anciens combattants et victimes de guerre (Arac) de la Sarthe a fêté ses cent ans de combat pour la paix, à la maison des Arts d’Allonnes. Outre la défense légitime des intérêts de ses adhérents, elle donne aussi de la voix dans le débat public et son avis sur les affaires militaires du pays et les armes nucléaires.

L’Arac est une association atypique dans le milieu des anciens combattants et, localement, délibérément post-combattante pour la paix.

Henri Barbusse, auteur de Le Feu (prix Goncourt 1916) [1] en fut le cofondateur avec Raymond Lefebvre mais aussi, dès novembre 1917, son premier président. Aujourd’hui encore, l’ARAC reste mobilisée « pour lutter contre la guerre, vivre mieux ensemble sans racisme, sans conflits ni armes nucléaires » (cf. Ouest-France du 14 novembre 2017, c’est nous qui soulignons). C’est encore avec cette différence qu’elle a voulu, localement, célébrer son centenaire en privilégiant la « Paix par la culture » à une conventionnelle journée de componction axée sur le souvenir (O.-F. du 11 novembre 2017).

« Tout pour unir, rien faire pour diviser », nous voudrions partager totalement cette devise de l’un des congrès de l’ARAC. Cependant, longtemps, peu ou prou, l’association a accompagné le Parti communiste français, dont il était son parangon, et de facto, a plus condamné les velléités impérialistes étasuniennes et l’escalade dans ses équipements que celles de son miroir réfléchissant à l’Est.

La ville sur tous les fronts

La ville d’Allonnes était aussi partenaire du centenaire de l’Arac. Depuis le 1er septembre 2017, elle a aussi rejoint l’association des maires et mairies contre toutes les armes nucléaires, « Mayors for peace » chaperonnée par les maires successifs d’Hiroshima (nous vous en avions parlé ici : ) et sa déclinaison hexagonale l’Association française des communes, départements et régions pour la Paix (AFCDRP).

Des 11-Novembre pas comme les autres, avec La Chanson de Craonne

Allonnes a aussi une place de la Paix. La ville, ce qui est plus rarissime, y a aussi érigé, en 1978, une stèle « pour la paix et la liberté aux victimes des guerres ». Chaque 11 novembre, l’Arac et d’autres associations (la Ligue des droits de l’Homme, la Libre pensée et l’Union pacifiste, l’Association des élus communistes et républicains du Mans), des personnalités (Mostafa Nafaa, conseiller municipal délégué aux droits humains pour la ville d’Allonnes, mais aussi le passionné d’histoire Eric Viot [2], et cette année, Julien Burette, descendant du fusillé pour l’exemple Arnold Maille), et des individuels (pacifistes, non-violents, antimilitaristes) se rassemblent devant ce cénotaphe pour  la réhabilitation desdits fusillés et abhorrer tous les fauteurs de guerre, courses aux armements, ventes d’armes, engagements militaires, budgets militaires, absences aux négociations sur le désarmement… Et, tout particulièrement, les armes nucléaires y sont copieusement fustigées.

Acmé de cette célébration : La Chanson de Craonne [3] reprise par les participants !  En écouter une version, c’est là : .

Aperçu du programme

Le programme retranscrit ici est seulement informatif. Le temps de réactivité oblige, la plupart des événements sont déjà passés.

11 novembre.  La première partie culturelle de cet « anniversaire » a été assurée par le rappeur Yukoff (aussi conseiller municipal d’Allonnes), suivi d’un duo avec Mourad El Mrini (artiste local) et Nicolas Beaunay (pour un set hip hop inspiré des textes de Malcolm X et Martin Luther King). Subtile contre-pied à la compassionnelle minute de silence, là, le public a été convié à une retentissante « minute de bruit » à réveiller les sinistres Nivel, Joffre, Boutegourd et autres vendeurs d’armes, fauteurs et profiteurs de conflits, dans leurs tombes. La seconde partie proposait une création de la Compagnie Théâtre en actes intitulée « Les gardiens de la terre » (pièce en deux actes sur la Première guerre mondiale vue par des « poilus » (côté tranchées) et des femmes (côté arrière, dans les fermes, industries).

7 novembre.  Concert à la Maison des arts des jeunes musiciens professionnels du projet « Les talents d’Al Kamandjâti » (l’association œuvre au développement artistique en Palestine, notamment avec la création d’écoles de musique).

18 novembre.  Dans le cadre de « Duo de mots » , lecture de textes littéraires autour de 14-18 intitulée « Guerre à la guerre » lus par le comédien Christian Brouard et les bibliothécaires de la médiathèque Louise-Michel.

23 novembre (dernière prestation). — Lecture musicale nommée « Poilu·e·s » dite par Margot Châron (cornélienne) et Emmanuel Pleintel (comédien pianiste).

Deux expositions se sont également succédé à la médiathèque Louise-Michel (avec vernissage et débat le 8 novembre, thème : « Culture de paix »).

4-10 novembre. — Rétrospective sur Henri Barbusse, fondateur de l’Arac, et de son engagement contre toutes les formes de conflits.

4-25 novembre. — Mini-expo « Putain de guerre », extraite de l’œuvre de Tardi (bédétiste qu’on pourra encore retrouver dans l’exposition « Le dernier assaut » à l’abbaye de l’Épau jusqu’au 11 mars 2018).


[1] Démobilisé en 2016 à l’age de quarante-trois ans après deux années passées, souvent en première ligne, au sein du 231e régiment d’infanterie où il s’est engagé volontairement malgré ses positions pacifistes d’avant-guerre, son manuscrit paraît d’abord sous forme de feuilleton dans le quotidien l’Œuvre à partir du 3 août 1916 avant d’être édité par Flammarion. Fervent promoteur d’une éducation populaire dans le domaine des arts et la littérature prolétarienne (à l’Humanité puis, dans la revue Monde) il flirtera avec la nomenklatura soviétique, ses tribulations et les déconvenues politiques de cette période que nous nous garderons bien de juger — ici — à l’aune de nos informations d’aujourd’hui.

[2] Salarié chez Class, passionné d’histoire, conférencier, militant, il œuvre pour la réhabilitation des fusillés pour l’exemple de la Première guerre mondiale et entame un travail de mémoire sur les anciens de la guerre d’Algérie (dont il recherche des témoignages). Auteur de Soldats manceaux pendant la Grande guerre, du roman Les blessures de l’âme (Ed, Société des écrivains) et plus récemment de Fusillés non réhabilités (plus de renseignements, c’est là : ).

[3] La Chanson de Craonne (auteur·s/autrice·s anonyme·s) est connue pour avoir été entonnée dans les tranchées et par des soldats qui se sont mutinés notamment après la désastreuse offensive du Chemin des Dames.


Crédit photos : SdN 72. Logos : capture d’écran sur le site de l’associations (cf. plus haut). Affiches : reprise dans Allonneinfos n° 208 de décembre 2017.